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25 mai 2012 5 25 /05 /mai /2012 15:31

La qualité de la preuve

 

"Ils ne savaient pas que c’était impossible, alors ils l’ont fait." Cette citation de Mark Twain, maintes fois reprise comme une ode à l’audace et à l’imagination, a trouvé récemment de nouveaux échos dans le débat science-société. C’est, en France, l’exemple du géochimiste Claude Allègre qui porte sur les plateaux télévisés les couleurs délavées des thèses des climato-sceptiques. Lesquels ont pour objectif de dédouaner notre mode de vie, avec une consommation effrénée d’énergies fossiles, de tout impact dommageable sur la planète. Ce sont les expérimentateurs malheureux de l’expérience Opéra, ces neutrinos perçus comme plus rapides que la lumière. Ou encore les promoteurs de la théorie Mond, laquelle propose une alternative à l’existence de la matière noire en modifiant, à grande distance, l’action de la loi de la gravitation de Newton. Sans oublier tous ceux qui affirment détrôner Einstein, jeter aux orties la théorie consensuelle du big bang, ainsi que les physiciens théoriciens dont les modèles d’Univers fonctionnent parfaitement… sur ordinateur. Copernic, Galilée, Wegener ou Einstein, avant eux, ne se sont-ils pas trouvés dans une position semblable : seuls contre tous ? En conflit avec tout le monde ?

La question mérite d’être posée : peut-on avoir raison seul contre tous ? Comme ce prix Nobel de chimie 2011, attribué à Daniel Shechtman, pour la découverte en 1982 des quasi-cristaux, et que ses collègues vont traiter méchamment pendant quelques années de “quasi-scientifique”… Comme le montre le dossier de ce numéro, le progrès des connaissances — particulièrement en astronomie — n’a jamais été une accumulation tranquille de vérités acceptées par tous. Un scientifique remarquait un jour qu’une théorie l’emportait souvent quand tous ses adversaires étaient morts ! De façon plus large, il convient sans doute de rappeler deux données incontestables : le fait d’être en désaccord avec tout le monde ne donne pas forcément raison ; et la science est une vérité provisoire.

Batailler pour défendre des idées fut le lot des génies comme des savants les plus marginaux. Mais cette confrontation ne se gagna jamais sur la place publique. La nature de la démarche scientifique impose d’apporter devant tous la qualité de la preuve ; même si la vérité d’aujourd’hui devient l’erreur de demain. Une maxime que Mark Twain aurait pu adopter ?

Alain Cirou

Directeur de la rédaction

 

Génies solitaires, la fin du mythe.

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24 avril 2012 2 24 /04 /avril /2012 06:00

20080701_AlainC_38.jpgPeut-on s’habituer aux nouvelles extraordinaires ? Il semble que oui… La preuve, cette annonce de l’ESO (European Southern Observatory), datée du 28 mars : “Un nouveau résultat […] montre que les planètes un peu plus grosses que la Terre sont très communes dans la zone habitable autour d’étoiles rouges de faible luminosité. L’équipe internationale qui a conduit cette recherche estime qu’il y a des dizaines de milliards de planètes de ce type, rien que dans la Voie lactée, et probablement une centaine dans le voisinage immédiat du Soleil.” Il n’est pas besoin d’évoquer des temps historiques pour se souvenir qu’avant 1995 — donc avant-hier —, nous habitions la seule planète connue de l’Univers. Pis : peu d’astronomes pensaient qu’il en existait d’autres et, a fortiori, que l’on puisse les découvrir !

Dix-sept ans après la détection de la première exoplanète par les astronomes Mayor et Queloz à l’observatoire de Haute-Provence, près de huit cents détections ont été confirmées. Et le sondage réalisé dans l’environnement d’une centaine de naines rouges, par l’équipe de Xavier Bonfils utilisant le spectromètre Harps sur le télescope de 3,6 m de l’observatoire de La Silla, au Chili, ouvre la porte à la multitude. S’il est possible de parler de “milliards”, c’est parce que cette catégorie d’étoiles, petites, faibles et froides comparées au Soleil est aussi la plus commune. Elle représente 80 % de la population stellaire de notre galaxie, soit environ 160 milliards des petites étoiles de la Voie lactée…

Si les journaux du monde entier n’ont pas fait leur une de cette nouvelle (“Pas de crise du logement dans la Voie lactée”, s’amusait notre confrère Hervé Morin du Monde), c’est que cette multitude statistique éteint le caractère d’unicité de la découverte. Des planètes, il y en a partout ! Dont acte.

Ce qui importe maintenant, c’est d’aller plus loin. Ce qu’explique, dans l’interview donnée à Ciel & Espace, l’astronome opticien Antoine Labeyrie dont le projet d’hypertélescope spatial de 100 km permettrait d’observer des exo-Terre dans un rayon d’une dizaine d’années-lumière. Et ce, avec une résolution suffisante pour rechercher la présence de vie, sous forme de taches dont la couleur changerait au cours des saisons. Un potentiel et, qui sait, un futur “extraordinaire”, auquel nous n’imaginons pas encore être habitués…

 

Alain Cirou 

Directeur de la rédaction

 

 

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27 mars 2012 2 27 /03 /mars /2012 15:17

Si l’origine de la Lune n’est pas bien comprise — et notre article consacré à l’énigme de l’eau vous en convaincra facilement —, il ne fait aucun doute, en revanche, qu’elle fut une  précieuse alliée pour le philosophe naturel de l’Antiquité et, aujourd’hui, pour l’homme de science, dans la découverte de son environnement spatio-temporel.

Le premier, soucieux de la représentation du monde, s’est vite rendu compte qu’elle sert souvent d’écran de projection à l’ombre de notre Terre. Et la mesure de sa distance comme la rondeur de l’obscurité l’ont alors aidé à préciser les dimensions de la planète. Le second, après avoir compris et mesuré l’influence gravitationnelle que le satellite exerce sur notre globe, a pu l’apprécier comme disque occulteur du Soleil, l’éclipse révélant alors l’environnement proche de notre étoile. Plus tard, en profitant du plus célèbre bras de fer de la guerre froide, l’aventure Apollo, il a pu entrer en possession d’archives vieilles de milliards d’années. Et ainsi “faire parler” ce proche témoin d’un temps où les bombardements météoritiques et cométaires intenses marquaient la face et transformaient l’environnement de la Terre primitive…

Son rôle aurait pu s’arrêter là — il est déjà énorme — sans l’idée géniale de l’équipe de Michael Sterzik, astronome à l’ESO au Chili, d’utiliser le Very Large Telescope pour analyser la lumière cendrée !

Chaque curieux du ciel connaît ces quelques jours, avant ou après la Nouvelle Lune, quand cette dernière est une virgule sur l’horizon, un très fin croissant, qui laisse voir le reste du disque, légèrement éclairé par la lumière… de la Terre. Cette lumière cendrée est notre reflet dans le miroir de la Lune. Mais elle peut aussi être vue “comme si” nous étions très loin d’ici — dans la situation d’astronomes extraterrestres, à plusieurs années-lumière de là — et que nous ne disposions que de très peu de lumière pour décrire la nature de la troisième planète du Système solaire découverte dans une zone d’habitabilité.

L’exercice est un formidable succès. Les biosignatures — les empreintes digitales de la vie — ont été vues dans cette lumière réfléchie de la Terre. Mais mieux encore, les astronomes ont pu en déduire qu’il y a une couverture de végétation, des océans et une atmosphère nuageuse. En montrant qu’il y a de la vie sur Terre, la Lune s’inscrit une nouvelle fois dans la modernité, celle de la recherche des mondes habités.

 

Alain Cirou

Directeur de la rédaction

 

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24 février 2012 5 24 /02 /février /2012 06:00

      Le mouvement, c’est de la vie ! Et pour mesurer ce changement, cette transformation, les physiciens disposent d’un outil universel : l’énergie ! Et le moins que l’on puisse dire est que notre équipe n’a pas manqué de ce “fluide vital” pour fabriquer le nouveau Ciel & Espace.

Il part d’un constat évident : à l’heure d’Internet et des réseaux sociaux, l’information circule et s’échange à la vitesse de la lumière. Et pour qui est équipé de ces nouveaux outils, fixes ou mobiles, il est souvent plus facile de suivre la progression d’un robot sur Mars que de disposer des comptes-rendus de la dernière séance du conseil municipal voisin… Chaque jour, une masse considérable de données circule sur la Toile, transformant radicalement notre relation à l’événement, notre rapport à l’espace et au temps. Mais il est un fait : le temps de la science n’est pas celui de ces médias de l’instantané. Et pour un magazine comme le nôtre, dont la vocation est d’informer sur la nature des découvertes astronomiques, il n’a jamais été aussi indispensable de vérifier la qualité de ces nouvelles, de les trier, leur donner un ordre, une hiérarchie, de les expliquer dans leur contexte, de les décoder et les commenter !

Notre site internet donne l’information immédiate. Nos podcasts, éléments numériques d’une encyclopédie audio, en dessinent l’environnement. Quant au magazine, sa rédaction s’attachera donc, chaque mois, à vous livrer les clés de l’actualité, un condensé d’événements choisis et analysés, ainsi que de nombreux sujets sélectionnés par ses journalistes pour leur capacité à éclairer, à donner du sens aux avancées des sciences de l’Univers.

De la même façon, et parce qu’il est indispensable que tout un chacun puisse pousser facilement les portes de ces domaines, la revue dans son ensemble est rendue plus claire, plus lisible et accessible à tous. Par l’intermédiaire d’une nouvelle maquette, de pages dédiées à la découverte des enjeux de l’astronomie, et à la pratique de l’observation ; par l’ajout d’encadrés, de schémas, l’invention d’une iconographie soucieuse d’expliquer, de décrypter, de… vulgariser !

Là est sans doute le pari le plus difficile à relever. Faire simple et juste est souvent extrêmement complexe. Et demande beaucoup d’énergie… D’où l’importance du changement. Bonne découverte !

 

Alain Cirou

Directeur de la rédaction

 

CEE502_couverture.jpgNOUVELLE FORMULE

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20 janvier 2012 5 20 /01 /janvier /2012 10:30

Editorial

Le hasard nous ressemble*

 

20080701_AlainC_38.jpgParfois le hasard est facétieux. C’est le cas pour cette mère de famille de Draveil, dans l’Essonne, au nom prédestiné, Martine Comette, chez qui fut découverte une météorite. Fichée dans le toit du pavillon qu’elle loue, cette “chondrite” d’une centaine de grammes, provenant de la Ceinture d’astéroïdes entre Mars et Jupiter, fut découverte par un ouvrier venu changer des tuiles cassées… Alain Carion, collectionneur et vendeur de pierres tombées du ciel, regrettera que la tuile n’ait pas été conservée pour enrichir la qualité des expositions.

Peut-être ce même hasard est-il adepte de l’humour à répétitions quand il fit choir récemment, dans une petite ville de Sibérie, un élément du lanceur russe Soyouz près d’une maison située “rue du Cosmonaute” !

Mais il n’est plus qu’un facteur déclenchant quand, au cours de l’été dernier, en plein cœur de la journée, il attire l’attention des nomades sahariens sous la forme d’une boule de feu qui traverse le ciel. Et là, “quelque part” entre l’Algérie et le Maroc, sont collectées des roches dont un autre chasseur et vendeur de météorites français, Luc Labenne, reconnaîtra comme du matériau en provenance de Mars.

Au moins — pour le plus important morceau dévoilé — 28,5 g de shergottite, typique d’une roche arrachée à la planète rouge par un impact puissant. Potentiellement, la découverte est importante. Il s’agit de météorites “fraîches”, non altérées par un long séjour sur Terre, des débris qui n’ont pas eu le temps d’être érodés par l’eau, le vent, le sable et la poussière.

Il suffit de se souvenir de l’annonce faite par la Nasa, durant l’été 1996, de la “découverte” de traces de vie fossile au cœur d’une météorite martienne tombée 13 000 ans auparavant, et de la polémique qui s’ensuivit, pour apprécier l’absence de contamination bactérienne liée à un long séjour sur notre planète.

Si la place du hasard s’est fortement réduite, c’est qu’au fil des ans une chaîne de collecteurs s’est mise en place. Professionnalisée. Les premiers ont appris à reconnaître une croûte de fusion — typique d’une rentrée atmosphérique — et ratissent le terrain. Les seconds récupèrent les matériaux suspects, cèdent une partie de leur moisson aux laboratoires professionnels, en contrepartie d’une authentification, et fournissent autant la recherche que le marché des collectionneurs. Chacun y trouve son compte.

De même, en matière d’astronomie, le rôle et la place des amateurs dans le processus de découverte ne doivent plus grand-chose à la chance et au hasard. L’exemple de Claudine Rinner, la première Française à découvrir une comète depuis près de quinze ans, est édifiant.

Son histoire, que vous découvrirez dans ce numéro, est autant celle d’une passion que d’une méthode de recherche systématique couronnée de succès. En pilotant depuis la banlieue de Mulhouse un télescope automatique installé au sommet d’une montagne de l’Atlas marocain, elle illustre à merveille l’opportunité saisie par certains “amateurs”, bénéficiant de la révolution des technologies optiques, logicielles et numériques, de réaliser un travail de chercheur. Pour le plaisir, évidemment, mais aussi pour laisser au hasard la part qui lui revient : là où nous ne sommes pas encore allés…

 

Alain Cirou

Directeur de la rédaction

 

* Georges Bernanos

 cieletespace_501_couv.jpgLA VERITE SUR LES JUMELLES DE LA TERRE


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3 janvier 2012 2 03 /01 /janvier /2012 11:37

Éditorial

 

On n’a pas tous les jours 500 ! C’est-à-dire un demi-millier d’éditions diffusées depuis la naissance, en novembre 1945, du premier Bulletin de la Société astronomique de Normandie. Une feuille ronéotée, signée Pierre Bourge, responsable régional de la Jeunesse astronomique de France à Paris…

Voilà pourquoi vous tenez entre les mains ce numéro exceptionnel, conçu par toute l’équipe de Ciel & Espace, pour fêter l’événement de ce compte rond. N’en déplaise aux responsables marketing — dont le métier n’existait pas à la naissance de notre publication —, le succès d’une revue n’est pas celui d’une recette éprouvée, mais le fruit d’une rencontre : celle d’un public et d’une rédaction. D’un besoin et d’une vision du monde qui lui correspond.

Sans doute faut-il rappeler ici que Ciel & Espace n’appartient ni à un homme, ni à une société commerciale, mais est éditée par l’Association française d’astronomie (AFA), une association à but non lucratif, dont l’un des objectifs est le partage des connaissances à travers la diffusion d’informations scientifiques au plus grand nombre.

Tout d’abord rédigée par des astronomes amateurs bénévoles, la publication a changé cinq fois de titre en 27 ans, avant de s’implanter en kiosques sous son nom actuel. Professionnalisée à partir de 1981, puis mensualisée en 1988, Ciel & Espace accompagne depuis lors tous ceux qui, de près ou de loin, s’intéressent aux événements célestes, aux sciences spatiales et aux grands mystères de l’Univers. Par leurs contributions, nos lecteurs — vous ! — grand public, curieux, amateurs d’astronomie,  astronomes amateurs et professionnels, ont souvent enrichi les contenus éditoriaux d’informations, d’images, de commentaires et de débats. Et placé notre magazine au premier rang des publications francophones en astronomie.

C’est pourquoi ce numéro spécial s’architecture autour de deux grandes thématiques : l’histoire, par l’entremise des liens qu’entretient notre publication avec ses lecteurs ; et l’avenir, par le prisme des défis auxquels les astronomes devront faire face, chacun dans sa discipline, au cours des années à venir. Vous découvrirez dans ces deux “espace-temps” de nombreuses signatures connues, des contributions amicales, originales, provocatrices parfois, composantes essentielles d’un spectre d’intérêts complet.

En 2012, et dans les années à venir, Ciel & Espace évoluera pour mieux répondre à vos demandes d’informations, d’explications et d’interactivité.

Si l’information peut circuler à la vitesse de la lumière et adopter facilement le canal du numérique, le temps long de la vérification, de l’explication, du commentaire et de l’analyse, suppose, lui, le maintien de compétences journalistiques et de supports adaptés. Cette conviction est aussi la feuille de route des numéros à venir, la rencontre que nous souhaitons renouveler chaque mois avec vous. Au nom des équipes de Ciel & Espace et de l’AFA, excellente année à toutes et à tous !

 

Par Alain Cirou

directeur de la rédaction de Ciel & Espace

 

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24 novembre 2011 4 24 /11 /novembre /2011 00:00

Il y a tout juste cinquante ans, le 19 décembre 1961, sous l’impulsion du général de Gaulle, la France entrait dans l’ère spatiale. Quatre ans après le lancement du Spoutnik soviétique et huit mois seulement après le vol de Youri Gagarine, notre pays se dotait d’un nouvel organisme dédié à l’étude de l’espace : le Centre national d’études spatiales. Un demi-siècle plus tard, le même Cnes célèbre cet anniversaire à travers différentes manifestations, nous rappelant les nombreux épisodes de cette “aventure”.

Les tout premiers s’écrivent en Algérie, avec Véronique, la première fusée française lancée dès 1952 depuis la base d’Hammaguir. Puis avec les engins d’essai Rubis, Agate, Topaze et Émeraude, les fameuses “Pierres précieuses” qui vont servir de base au futurlanceur Diamant.

Avec encore, le 26 novembre 1965, la mise sur orbite de la capsule Astérix, 47 kg toutes antennes déployées, qui permet à la France de revendiquer le rang de troisième puissance spatiale mondiale, avec ce premier satellite artificiel.

Mais aussi avec la malheureuse saga d’Europa 1, en Australie ; ses neuf tirs et ses neuf échecs. Et, enfin, à Kourou, en Guyane, quand le 24 décembre 1979 s’élève dans le ciel équatorial la première fusée Ariane. Les témoins se souviennent que c’est par une bataille de boules de neige — celle formée par la condensation autour de trop-plein des réservoirs d’oxygène et d’hydrogène liquides de la fusée — que fut célébré sous les tropiques le succès de ce tir historique !

Cinquante ans d’espace français, c’est une histoire à lire, ou découvrir (1), mais c’est aussi l’envie de se projeter plus loin. D’imaginer le futur de cet “ailleurs” qui s’est aujourd’hui, en grande partie, dissous dans l’activité économique du pays et a rompu avec les clichés romantiques d’une pseudo-libération humaine de la gravité…

Aujourd’hui, l’espace, ce sont des télécommunications, l’observation de la Terre et des océans, de l’atmosphère, des nuages, des glaces et du climat. Ce sont des satellites militaires pour le renseignement et la sécurité. C’est du GPS, et bientôt du Galileo européen, avec la géolocalisation des personnes, des mobiles et des biens au centimètre près. C’est évidemment, et les lecteurs de Ciel & Espace le savent mieux que quiconque, des sondes d’exploration du Système solaire, des télescopes pour l’étude de l’Univers profond.

Enfin, aujourd’hui avec les seuls vaisseaux russes et chinois, ce sont des vols habités autour de la Terre et à destination de l’ISS. Pour faire simple, c’est du prestige, du commerce, de la haute technologie, des services, de la science et de la guerre ! C’est utile, pratique, stratégique, mais cela ne fait plus rêver. En particulier, les nouvelles générations, nées sur une planète interconnectée, mondialisée et pour une part, bercées d’aventures numériques dans les mondes virtuels. , aimait à rappeler Hubert Curien, ancien président du Cnes et regretté ministre de la Recherche. Il faudra s’en souvenir, autant pour inventer de nouveaux rêves que pour les mettre à l’épreuve de la réalité.

Alain Cirou

Diracteur de la rédaction

 



(1) Voir www.cnes.fr.

 

cieletespace 499 dec2011 couv

 

Découverte : une averse de comètes à l'origine des océans.

A lire aussi : Science et religion, le ciel peut-il se passer de Dieu ?

Ciel & Espace, numéro de décembre 2011.

 

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24 octobre 2011 1 24 /10 /octobre /2011 12:32

L’ombre d’Albert

20080701_AlainC_38.jpgQuel bel automne pour les amateurs d’énigmes scientifiques ! C’est tout d’abord l’annonce, le 23 septembre, d’un résultat étonnant : des neutrinos auraient dépassé la vitesse de la lumière… Les chercheurs de l’expérience internationale Opera, qui étudient les faisceaux de neutrinos produits au Cern, à Genève, depuis leur laboratoire souterrain du Gran Sasso, en Italie, ont mesuré qu’entre l’émetteur et le récepteur, au bout de 730 km, ces particules franchissent la ligne d’arrivée avec 20 m d’avance sur la lumière. Ce résultat a deux explications possibles : une erreur dans la mesure ou encore, et là serait l’extraordinaire, un dépassement de la vitesse de la lumière.

Dans ce cas, jugé comme peu probable par les scientifiques, les implications de cette observation pour la physique et la cosmologie pourraient être considérables, comme vous le découvrirez dans ce numéro de Ciel & Espace.

C’est ensuite, le mardi 4 octobre, la récompense suprême du prix Nobel de physique décerné à trois astrophysiciens pour avoir montré que l’expansion de l’Univers s’accélère sous l’effet d’une mystérieuse “énergie noire”. Là encore, comme pour l’expérience des neutrinos, ce résultat inattendu enregistré en 1998 n’était pas le but de l’expérience conduite sur les supernovae lointaines qui s’intéressait avant tout à mesurer la densité de matière du cosmos.

En observant une lumière plus faible qu’attendu, sur une cinquantaine d’étoiles en explosion, il fallut bien se rendre à l’évidence : contrairement à la conviction de l’époque, où l’on pensait que l’expansion de l’Univers devait être freinée par l’effet de sa propre masse, voire s’inverser en un spectaculaire big crunch, il apparaît que celle-ci s’accélère. Et si cela continue, souligne le comité Nobel, “l’Univers terminera dans la glace”… Treize ans plus tard, l’énigme de l’énergie noirecette force mystérieuse qui dilate l’espace-temps — reste entière. Pis, ce fantôme compte aujourd’hui pour 70 % du total du cosmos.

“Nous tentions de comprendre ce résultat fou. […] Nous étions un peu effrayés”, explique l’Australo-Américain Brian Schmidt, l’un des récipiendaires du Nobel de physique. L’ombre d’Albert Einstein, qui jugeait déjà dans les années 1920 l’idée d’expansion comme  “abominable”, n’y était sans doute pas étrangère…

“Ce résultat est totalement inattendu”, explique pour sa part Antonio Ereditato, porte-parole de l’expérience Opera. “Les chercheurs […] sont impatients de comparer leurs résultats avec d’autres expériences de manière à pleinement évaluer la nature de cette observation”, souligne-t-il.

Là aussi, l’ombre du fameux savant iconique, père de la relativité restreinte qui fige la course de la lumière à la valeur finie et indépassable de 300 000 km/s, plane au-dessus des débatteurs. Doit-on remettre en cause l’héritage scientifique d’Einstein — jusqu’alors toujours vérifié expérimentalement — à partir d’éléments si ténus ? La pensée rationnelle peut en douter, mais les résultats des observations l’obligent. Quitte à chasser les ombres… les plus imposantes.

Alain Cirou

Directeur de la rédaction.

En kiosque le 25 octobre. 

 

498_cieletespace_dec11.jpg

Ciel & Espace, numéro de décembre, Mars, l'ère des prospecteurs.

 

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einstein.jpgA lire également, le hors série La face cachée d'Einstein.


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22 septembre 2011 4 22 /09 /septembre /2011 23:38

20080701_AlainC_38.jpgL'espace russe vit des heures difficiles. Nonobstant la bénédiction donnée par le prêtre orthodoxe de l’église de Baïkonour, sur le pas de tir avant chaque départ de fusée, ce ne sont pas moins de quatre lanceurs, en neuf mois, qui ont échoué à placer leur charge sur orbite. En tout, six satellites ou vaisseaux détruits, 400 millions d’euros de perte pour l’agence spatiale russe Roskosmos — dont, le 24 août, le cargo Progress qui transportait trois tonnes de vivres et de matériel à destination de la station spatiale internationale (ISS). Et ce dernier épisode, catastrophique pour l’image de fiabilité des fusées Proton et Soyouz, est le premier problème qui touche un vaisseau Progress depuis sa mise en service en 1978, du temps de l’Union soviétique.

Paradoxalement, cette série noire intervient au moment où l’industrie spatiale russe est en pleine modernisation. En effet, à la fin des années 1990, l’éclatement de l’URSS a privé ce secteur de tout moyen. Enfant chéri du système depuis Spoutnik et Gagarine, il est au cœur de l’effondrement de la branche militaro-industrielle, qui se caractérise alors par une totale opacité des coûts réels et une nébuleuse obscure d’acteurs décideurs. Des centaines d’entreprises intriquées, dépendantes d’une dizaine de ministères, ont vu alors leurs budgets disparaître brutalement et leurs ingénieurs expérimentés changer d’activité. Il faudra attendreVladimir Poutine, au début des années 2000, alerté par la déliquescence de ce secteur stratégique, pour voir se dessiner un plan de restructuration et surtout, un budget remis à flot qui atteint aujourd’hui 2 milliards d’euros.

Le plan de charge de l’industrie spatiale russe n’est pas mince : avec la fin des navettes spatiales américaines, elle a l’obligation de desservir l’ISS. À 50 millions de dollars le siège, l’affaire est financièrement attractive… De la même façon, l’exportation du Soyouz en Guyane est une nouvelle et belle ouverture commerciale pour le lanceur le plus sûr du monde : plus de 1 770 vols enregistrés avec succès.

Quant à la demande civile et militaire d’équiper la Russiemoderne de systèmes de communication et de localisation à partir de l’espace, elle est jugée stratégique par le pouvoir en place. Tout devrait donc être “vert”. Mais le plan de restructuration n’est pas abouti. Sur les chaînes de fabrication, les contrôles qualité et sécurité sont critiqués. Le secteur manque de cadres qualifiés et les salaires ne sont pas attractifs. En moyenne, la rémunération d’un ingénieur de Roskosmos ne dépasse pas 600 € (contre 1 000 € pour un salaire moyen à Moscou). “Il n’est pas normal qu’un spécialiste de l’aérospatiale reçoive le même salaire qu’un vendeur de glaces”, écrit un expert dans la revue Novosti Kosmonavtiki. Enfin, les circuits financiers restent opaques et l’afflux de dollars attire les convoitises.

Quoi qu’il arrive, cette série de déboires a d’ores et déjà des conséquences. À Moscou, bien sûr, où l’on s’active pour restaurer la fiabilité des lanceurs. Et aux États-Unis, où, moins de deux mois après l’arrêt des navettes, le Congrès s’émeut de sa dépendance d’accès à l’espace habité. Une situation “d’apesanteur” politique américaine, pendante au trou d’air russe.

 

par Alain Cirou

directeur de la rédaction de Ciel & Espace

 

une cieletespace octobre 2011 420Ciel & Espace, numéro d'octobre 2011, Découverte, on a vu naître les étoiles.

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26 août 2011 5 26 /08 /août /2011 10:11

Edito n°496

 

Il reste, dans le Système solaire, peu de "premières visites" inscrites aux programmes des agences spatiales. Il y a la lointaine planète naine Pluton et ses quatre lunes, qu'atteindra la sonde américaine New Horizons, le 14 juillet 2015. Ou encore, l'essentiel des satellites d'Uranus et de Neptune, trop rapidement frôlés par la sonde Voyager 2. Sans même oublier la comète Tchourioumov-Guerassimenko, autour de laquelle devrait se placer en orbite la mission européenne Rosetta, en août 2014, avant d'y déposer un petit atterrisseur. Mais la liste des rendez-vous attendus n'est pas si longue...

Et c'est pour cela que les premières vues - fantastiques de qualité - de l'astéroïde Vesta sont l'événement de l'été. LE reportage photo du "bout du monde" qu'il faut découvrir en cette rentrée de vacances.

Visible à l'œil nu dans la constellation du Capricorne, à l'opposition, ce petit corps, qui est aussi l'un des principaux astéroïdes de la ceinture principale, a été rejoint avec succès par la sonde américaine Dawn le 15 juillet dernier. Les premières images, transmises par l'équipe scientifique dans le courant du mois d'août, alors que la sonde s'installait en orbite à 2 700 km de ce monde rocheux, sont un choc. Sans être géologue, on devine facilement que cette archive, ce palimpseste des premiers temps du Système solaire, a beaucoup à nous dire. On y voit une multitude de cratères, de tailles et d'âges très variés ; des montagnes abruptes et des collines en pente douce ; la cicatrice d'un très violent choc qui a failli désagréger totalement l'astéroïde ; et, ceinturant la petite planète, de curieux bourrelets qui ne sont pas sans rappeler la "crête équatoriale" de Japet, le troisième plus grand satellite naturel de Saturne. Comprendre la variété des processus mis en œuvre à sa surface et reconstituer son histoire ne sera pas simple...

 Mais Vesta n'est pas seulement un monde nouveau et supplémentaire à classer dans le grand bestiaire de la diversité planétaire. Il se dévoile au moment même où s'opère un tournant dans la politique spatiale américaine. Avec la fin des navettes, l'abandon d'un retour à la Lune versus Apollo, et la priorité robotique donnée à un retour d'échantillons martiens, ce corps céleste s'inscrit en force comme un modèle crédible de destination nouvelle pour l'exploration humaine, hors de la sphère d'influence de la Terre. Si celui-là est trop éloigné - actuellement à 184 millions de kilomètres d'ici - d'autres ne le sont pas. Comme ceux retenus par le projet Plymouth Rock, proposé par l'équipe de Lockheed Martin, que vous découvrirez dans notre dossier, et qui peuvent être atteints en quelques mois de voyage.

Mais nous n'en sommes pas là. Manque encore une décision politique forte, un nouveau lanceur lourd, un vaisseau spatial bien plus spacieux qu'une simple chaloupe et un programme international financé. En attendant, on continuera à collecter les échantillons d'astéroïdes qui tombent sur Terre - Vesta n'est pas en reste - même si cette chasse au trésor reste un beau challenge. Ceux qui cherchent des morceaux de la météorite qui s'est désintégrée au-dessus de la Bretagne le 20 juillet en savent quelque chose : la découverte des pierres tombées du ciel reste à faire !

Exergue : Les premières images de la sonde Dawn sont un choc. Et l'on devine que ce palimpseste des premiers temps du Système solaire a beaucoup à nous dire.

Alain Cirou

Directeur de la rédaction


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Astéroïdes, les nouvelles cibles de l'exploration

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